Congrès international Richard Wagner,
du 7 au 10 juin 2017
Sous un soleil chaud et radieux s’est déroulé, à Budapest, le Congrès International 2017 des cercles Richard Wagner, réunissant une vingtaine d’adhérents du CNRW-Paris.
La séance d’ouverture, présidée par M. Horst Eggers, président international, en présence d’Eva Wagner-Pasquier, notre présidente d’honneur, a été suivie de l’assemblée générale des délégués. Annie Benoit, présidente, y représentait notre Cercle.
Nous avons eu droit à un très joli concert d’ouverture du Congrès, dans le bâtiment de La Redoute, sur le bord du Danube, illuminé par la soprano Lilla Horti, élève de la grande cantatrice hongroise Éva Marton, attentive, au 1er rang de l’auditoire, dans l’air d’entrée d’Elisabeth de Tannhäuser, « Dich teure Halle ». Cette jeune chanteuse a révélé une voix épanouie, et commence une belle carrière internationale dans des rôles wagnériens. Le concert s‘est conclu, avec éclat, par les solistes du quatuor Kelemen, dans 2 mouvements du quatuor opus 25 de Brahms. Nous avons été fascinés par la complicité entre ces artistes, la joie et l’enthousiasme des deux sœurs Kokas (Katalin à l’alto, et Dóra au violoncelle).
Visites de la ville, excursions, ont permis à tous d’agrémenter, au mieux, leur séjour. Des événements méritaient le voyage : au Palais des Arts, une représentation de Parsifal, et, le lendemain, dans le très joli Opéra national Hongrois, véritable petit Opéra Garnier, dans la même soirée, 2 opéras : Mario et le Magicien, de János Vajda, et Le Château de Barbe-Bleue, de Béla Bartók.
Parsifal : un « opéra en noir et blanc »…
Le Palais des Arts est un bâtiment moderne inauguré en mars 2005. Dans la salle de concert nationale Béla Bartók (auditorium à la très bonne acoustique), il était difficile d’envisager une mise en scène classique. Les metteurs en scène, Alexandra Szemerédy et Magdolna Parditka, ont donc imaginé une scénographie originale, en utilisant les galeries entourant la scène pour y installer les chœurs et la salle où déambuleront les chevaliers du Graal. Les deux scénographes vont s’inspirer d’un poème de Wolfram von Eschenbach ayant pour thème la noirceur de l’enfer et la lumière du paradis. Les chanteurs ne sont pas en costume, seulement en frac noir et robes longues. Kundry porte une robe noire au 1er acte, rouge au 2e et blanche au 3e. La scène est recouverte d’une toile noire, qui va disparaitre au fil des actes. Le 1er acte est noir, symbole du chaos et de l’ignorance. Le 2e, noir et blanc, est celui des questions, du doute et de la recherche ; les personnages sont partagés entre les 2 espaces, Kundry et les filles-fleurs (très sexy dans leur minirobe noire) ne franchiront pas la limite, et le côté pur virera au rouge lorsque Parsifal sera au bord de la tentation. Au 3e acte, tout s’éclaire et devient blanc et pur.
La distribution est à la hauteur de cette production passionnante :
Avec sa moustache à la Tom Selleck, Peter Seiffert n’a plus vraiment l’âge ni l’allure d’un jeune Parsifal ! Mais on reste impressionné par sa puissance vocale, le contrôle de son souffle et son énergie inépuisable. Sa partenaire, Violeta Urmana, n’est pas en reste, avec un timbre rond et lyrique, et une présence indéniable. Une très belle et intense Kundry.
Remplaçant Albert Pesendorfer initialement prévu, Eric Halfvarson, basse américaine et grand chanteur wagnérien, a interprété Gurnemanz avec le professionnalisme et l’humanité qu’on lui connaît depuis bien longtemps.
Le baryton estonien Lauri Vasar incarne un Amfortas torturé, bouleversant de réalisme, prisonnier de ses fautes passées et enchaîné par ses pairs. Il n’est libéré de ses chaînes que pour consacrer le Graal. Klingsor a la voix rêche du baryton-basse allemand Jürgen Linn. Un enfant, symbole de pureté et double de Parsifal, va accompagner celui-ci aux 2e et 3e actes. Au final, un message de paix, avec la colombe, sera apporté par trois jeunes garçons.
Les chœurs hongrois (adultes et enfants) étaient remarquables.
Ce Parsifal était dirigé, avec maestria, par l’excellent chef d’orchestre hongrois Adam Fischer, grand spécialiste des œuvres de Richard Wagner, qu’il dirige parfois à Bayreuth, et directeur artistique des journées Wagner de Budapest.
Mario et le Magicien
C’est un opéra contemporain en 1 acte du compositeur hongrois János Vajda, écrit en 1989 sur un livret de Gábor Bokkón, d’après une nouvelle de Thomas Mann (1930), où il dénonçait la dictature et le fascisme. Le personnage principal, Cipolla, est davantage un dictateur qu’un magicien. Grâce à ses talents d’hypnotiseur, il se fait passer, auprès du crédule Mario, pour la fille que celui-ci aime. S’apercevant de la supercherie, Mario tue Cipolla.
Dans un univers fellinien, où rôdent de nombreux personnages de films (4 exemplaires de Marylin, Superman…), sur des rythmes de valses populaires, le puissant Cipolla défie ses admirateurs et la mort. Le metteur en scène, Péter Galambos, utilise un dispositif vidéo qui permet au spectateur de visualiser deux niveaux d’images, avec surtout des gros plans. Le résultat est positif, même si on a peine à entrer dans cette farce, en dépit du talent des chanteurs, très bons comédiens.
Le Château de Barbe-Bleue
C’est l’unique opéra de Béla Bartók, composé en 1911, sous l’influence du Pelléas et Mélisande de Claude Debussy. Drame existentiel sombre en 1 acte et 2 personnages, cet opéra explore la difficulté du rapport amoureux entre homme et femme. Jugé « impossible à exécuter » lors de sa création, il est devenu une œuvre lyrique majeure du XXe siècle.
Péter Galambos, le même metteur en scène que pour Mario et le Magicien, va transformer ce drame en une représentation onirique du thème de Barbe-Bleue. Ce dernier va rêver toute son histoire, et celle de Judith, obsédée par les sept portes fermées. Le metteur en scène va accentuer le flou et la distanciation en faisant jouer ses personnages derrière un tulle et en projetant, sur des toiles transparentes, des paysages et des silhouettes.
Les 2 artistes hongrois, la grande mezzo-soprano Ildikó Komlósi (Judith) et la basse András Palerdi (Barbe-Bleue, et Cipolla dans la 1ère partie), nous ont offert une magistrale interprétation, pour laquelle ils ont été chaleureusement applaudis. Cette deuxième partie de soirée nous a semblé plus accessible, peut-être parce que mieux connue ?
Ces deux opéras étaient dirigés par le même chef et compositeur Janos Kovács.
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Dimanche soir, était proposé, à l’Opéra National, Háry János de Zoltán Kodály. Mais j’étais déjà repartie à Paris…
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Nous espérons être encore plus nombreux l’an prochain, du 21 au 24 juin 2018, à Innsbruck, où nous avons déjà noté un déplacement à Erl.
Chantal Barove